La polarité dynamique de l’église Saint Ignace – Paris

 L’église Saint-Ignace est l’église des jésuites à Paris située rue de Sèvres dans le VI° arrondissement. Elle a été construite dans un style néo-gothique par la Compagnie de Jésus en 1855 et dès sa construction elle est ouverte au public. Sans avoir pour autant de façade donnant sur la rue. Ce lieu est une illustration des innovations soutenues par le Pape Pie X. Ce nouvel élan dans le renouveau liturgique a permis en 1953 aux Jésuites de Paris d’inaugurer, en semaine, des messes du soir face au peuple sur un petit autel portatif avec les lectures en français. En 1960, un réaménagement très important de l’espace liturgique dans le chœur de l’église permet de valoriser les trois lieux de l’action liturgique : l’autel, l’ambon de la Parole et le siège de la présidence. A partir de mars 2001, quarante ans après, une dizaine de nouveaux aménagements de l’espace de célébration sont expérimentés pour être définis durablement en mars 2003.

Cette église s’est recomposée de l’intérieur au fur et à mesure donnant, in fine une forme nouvelle et harmonieuse à l’espace de la célébration. Cette évolution et ces expérimentations de l’emplacement de l’autel, de l’ambon de la présidence, de disposition de l’assemblée avec des éléments provisoires, correspond aux orientations de la Commission Episcopale de la Liturgie datant de 1965 : « Même si ce plan a été soigneusement élaboré, il serait imprudent de le réaliser aussitôt de façon définitive. Il convient, pour ériger un autel face au peuple, ou un ambon, par exemple, de réaliser d’abord des modèles provisoires, en matériaux légers et peu coûteux […]. On pourra, à l’expérience, en modifier peu à peu l’emplacement, la forme, les proportions. C’est seulement après plusieurs mois de mise à l’essai qu’on pourra procéder à des démolitions ou à des constructions définitives.[1] ». C’est en Mars 2007 que l’autel, l’ambon et la présidence sont  refait à l’identique mais en pierre.

Les architectes Benoît Ferré, Etienne Tricaud et Jean-Marie Duthilleul proposent de respecter le grand axe de l’église, de la porte au chœur en passant par l’autel. L’autel n’est pas au centre de la nef, mais légèrement vers l’ancien chœur. Cet ancien chœur est à présent séparé du nouveau chœur par deux portes réalisées en teck et constituant un claustra filtrant le regard et augmentant le côté mystique du lieu. L‘assemblée est disposé en forme de mandorle[2] ou d’ ellipse dans laquelle se déploie un triangle composé d’une ligne composé de l’ambon et du siège de présidence, adossé à un pilier et formant le petit axe de la composition, et de l’autel placé à l’un des deux foyers de l’ellipse. Ces trois éléments définissent le sanctuaire. Le second foyer est constitué de vide. Il est le lieu des célébrations vivantes : baptême, ordination, enterrement, etc.

L’entrée de l’église se fait par un sas constitué de panneau recouvert par un claustra de bois exotique, il filtre la vision que les fidèles ont de la rue depuis l’intérieur et également le regard que porte les visiteurs vers ce sanctuaire depuis la ville, Il permet également de limiter les nuisances sonores. Un narthex offre différents espaces. Face à l’entrée, dans l’axe majeur se déploie l’ensemble autel, ambon, présidence. Sur la gauche est aménagée une chapelle de la vierge qui accueille de manière très chaleureuse les fidèles. C’est un lieu de recueillement et de prière et de dévotion personnelle. La mise en scène de l’iconographie amène ainsi les personnes à une véritable intériorité. La partie de droite est dédiée à l’accueil proprement dit, avec les informations de la vie de l’église.

L’église, de style néo-gothique, possède quatre chapelles latérales peintes dans lesquelles la circulation est possible. Cette disposition a permis de libérer de toute circulation l’espace du sanctuaire. Ces chapelles ont retrouvés avec ce nouvel aménagement un rôle et une fonction. Elles participent à l’élargissement de l’espace liturgique mais également au placement de la chapelle dédiée au sacrement de réconciliation. Ce dispositif est très dynamique. Les fidèles alternent sans confusion les différents pôles de la liturgie, l’autel conservant toute sa prééminence. Les distances entres les fidèles sont suffisamment grandes pour que les fidèles ne soient pas gênées ou perturbés lors les célébrations. L’assemblée est placée sur des estrades en bois dans lesquelles circulent tous les éléments techniques et de confort. Ces estrades rendent bien visible l’action liturgique qui se déroule, l’autel n’étant surélever que d’un marchepied et le sol de l’église étant plan. L’assemblée peut se dilater et se disposer facilement dans les chapelles latérales qui servent également de lieu plus discret pour les fidèles qui recherchent plus de recueillement.

 

[1] . Commission Episcopale de Liturgie, Le renouveau liturgique et la disposition des églises, Directives pratiques, 20 juillet 1965, p.4.

[2] . Le mot mandorle vient de l’italien mandorla qui signifie amande. Il désigne une figure en forme d’ovale ou d’amande dans laquelle s’inscrivent des personnages sacrés.

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